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Cession de titres à prix minoré : une appréciation de plus en plus stricte

Serli KARAGOZYAN-LAUZE et Olivier LIPERINI, en collaboration avec Alexandre BALLESTRI

22 mai 2023

Dans une décision en date du 7 avril 2023, le Conseil d’État a jugé dans le cadre d’une cession de titres intra-groupe, qu’un écart de 14,1 % entre le prix de cession mentionné dans l’acte et la valeur vénale des titres était « significatif » et constitutif d’une libéralité (CE, 7 avril 2023, n°466247, Sté Crédit Agricole).

Pour rappel, l’Administration fiscale présume généralement de l’intention libérale lorsque la cession d’un élément d’actif a été réalisée à un prix manifestement minoré.

Plus précis, le Conseil d’État considérait jusqu’alors que le prix minoré s’entendait généralement d’un écart de 20 % entre le prix contractuel de cession et la valeur vénale des titres (notamment CE, 3 juillet 2009, n°301299). Cette nouvelle décision vient donc abaisser le curseur d’analyse et renforcer la position de l’Administration fiscale.


Dans cette récente décision, les titres d’une société non cotée ont été cédés entre sociétés d’un même groupe. L’Administration a considéré que la cession, évaluée à 14,1% en dessous de la valeur vénale qu’elle avait reconstituée, était constitutive d’une libéralité.

L’affaire est alors portée devant les juridictions administratives pour contester la requalification en libéralité.

Cette affaire a ainsi été portée par deux fois devant les Hauts magistrats pour apprécier le caractère significatif de la minoration du prix de cession des titres.

Par une première décision, le Conseil d’État a cassé et annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles pour contradiction de motifs, dans la mesure où la cour administrative d’appel, qui validait la méthode d’évaluation mathématique retenue par l’Administration fiscale, écartait en même temps tous les facteurs de décote dont se prévalait la requérante (CE, 26 octobre 2021, n°426462, Sté Crédit Agricole).

Lors de sa deuxième décision, le Conseil d’État saisit d’un nouveau pourvoi, annule la décision de la cour administrative de Versailles en réglant cette fois-ci l’affaire au fond.

Après avoir rappelé que la valeur vénale des actions non admises à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l’ensemble permet d’obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu’aurait entraîné le jeu normal de l’offre et de la demande à la date de la cession ou de l’apport, le Conseil d’État a validé la méthode suivie par l’Administration fiscale.

Par la suite, celui-ci a apprécié le caractère significatif de l’écart entre le prix de cession et la valeur vénale réelle des titres au regard des circonstances particulières de l’espèce.

Il a ainsi pu juger que l’écart de 14,1 % doit être regardé comme significatif « eu égard à la situation particulière de la société ». En effet, l’actif net de la société était principalement composé de trésorerie ou de placement équivalent qui permettait une évaluation pertinente selon une méthode mathématique ou patrimoniale.

En l’absence d’éléments justificatifs présentés par la société requérante, le Conseil d’État a décidé que cette cession minorée constituait bien un acte anormal de gestion.

Conséquences :

Le caractère « financier » de l’actif net réduit considérablement l’aléa et permet au Conseil d’État de juger qu’une cession avec un prix minoré d’à peine plus de 14 % par rapport à la valeur vénale est un acte anormal de gestion constitutif d’une libéralité.

La valeur plancher de 20 % jusqu’alors retenue par le juge de l’impôt apparaît donc être remise en cause par cette nouvelle décision.

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