28 Mar2017
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La notion d’imprévision en droit civil français, comme motif de révision des contrats : une nouveauté

Historiquement, le droit civil français refusait toute révision d’un contrat au motif d’un changement des circonstances économiques autour de la convention, et ce quand bien même ce changement modifiait gravement l’équilibre des prestations que les parties se doivent (affaire dite « du Canal de Craponne », arrêt C.Cass. du 6 mars 1876).

L’ordonnance du 10 février 2016 emportant réforme du droit des obligations apporte un bouleversement à ce sujet, en introduisant pour la première fois dans le Code civil diverses règles sur l’imprévision contractuelle, et notamment le nouvel article 1195 comme suit :
« Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.
En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe ».

Face à cette nouveauté importante du droit Français, le conseil de l’avocat sera doublement utile, à savoir :
-soit pour assister le client qui, dans le cadre d’un contrat, subit un changement de circonstances économiques (ou autre) rendant l’exécution dudit contrat « excessivement onéreuse » ; le droit français prévoit désormais un droit à la renégociation, amiable ou à défaut judiciaire (le juge peut « à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe » : le juge fixe lui-même les modalités de révision du contrat) ; l’assistance de l’avocat sera utile pour bien exercer ce droit ;
-soit pour bien rédiger son contrat, afin d’écarter expressément et conventionnellement ce mécanisme de révision (les dispositions de l’article 1195 étant supplétives de volonté, une clause peut être insérée au contrat pour accepter par avance les risques imprévisibles et refuser ainsi toute modification ultérieure du contrat à ce titre).

Laurent Rotgé